Ce coeur changeant d'Agnès Desarthe
Née à l’aube du XXe siècle, Rose débarque à Paris à 20 ans et se trouve projetée dans un univers totalement inconnu. L’affaire Dreyfus, puis la guerre de 14 éclatent. Les années folles se succèdent. Les bas-fonds, la vie de bohême, la solitude... Rose risque à tout moment de tomber.
Usant de toutes les ressources du romanesque, Agnès Desarthe mêle le murmure de l’intime et le souffle de l’Histoire dans ce grand livre baroque qui signe son retour à la fiction.
Les 33 premières pages ont été pour moi très difficiles car je n’arrivais pas à entrer dans le langage employé par l’auteure. C’est à partir de la page 36 qu’on entre vraiment dans l’histoire de Rose avec sa naissance et qu’on ne lâche plus ce livre. C’est d’abord l’originalité de ce roman et sa construction qui nous marquent et nous séduisent puis les personnages qui gravitent autour de Rose sa folle de mère, son incapable de père, son énorme grand-mère et sa magnifique nounou Zelada qui est présente comme une ombre tout au long du livre et qui semble lui souffler à l’oreille toutes les décisions qu’elle doit prendre et toutes les méthodes pour accomplir les tâches domestiques. Rose est à la fois très drôle parce que ignorante gamine candide incrédule mais d’un autre côté obstinée lucide pleine de bons sens et avec des réflexions très logiques sur la vie avec des croyances barbares qui nous font franchement rire. Agnès Desarthe nous emmène tantôt dans un conte avec des rencontres miraculeuses des situations un peu rocambolesques pour sauver Rose tantôt dans la réalité du Paris du début du siècle ses débauches ses orgies sa misère et sa pauvreté. Ce parcours était nécessaire à Rose pour se libérer de son enfance briser les chaînes avec sa famille j’ai eu l’impression que sa vie à Paris sans argent sans famille sans travail était comme une punition nécessaire pour renaître, 22 ans pour comprendre . « Rose était déjà morte tant de fois qu’elle ne craignait plus rien » D’ailleurs c’est de Paris qu’elle analyse la vie de ses parents et qu’elle comprend peu à peu ce qui se passait dans le château au Danemark. C’est enfin dans le rôle de mère qu’elle se sentira revivre et découvrir peut être la vraie vie.
Ce livre est porté par une écriture légère imagée avec des mots soigneusement choisis et a demandé à l’auteure beaucoup de travail de recherche c’est un livre qui surprend. Follement original !
Un mot sur l'auteure: déjà lus d' Agnès Desarthe: Mangez-moi -Dans la nuit brune- Une partie chasse et son écriture est toujours aussi lumineuse et l'histoire surprenante!
Cerise sur le gâteau: j'ai rencontré Agnès Desarthe elle est passionnante drôle et sympathique!