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Des Livres et des Paillettes
26 mars 2020

Le pays des autres de Leïla Slimani

le pays des autres

 « Le couple se figea dans une même attention, dans un égal recueillement. Pas une seule fois ils se regardèrent mais Dragan vit qu’ils se tenaient la main. A cet instant, ils n’étaient pas dans deux camps opposés. Ils ne se réjouissaient pas du malheur de l’autre. Ils n’attendaient pas que l’un pleure ou se félicite pour lui tomber dessus et l’accabler de reproches. Non, à cet instant, ils appartenaient tous deux à un camp qui n’existait pas, à un camp où se mêlaient de manière égale, et donc étrange, une indulgence pour la violence et une compassion pour les assassins et les assassinés. Tous les sentiments qui s’élevaient en eux leur apparaissaient comme une traîtrise et ils préféraient donc les taire. Ils étaient à la fois victimes et bourreaux, compagnons et adversaires, deux êtres hybrides incapables de donner un nom à leur loyauté. Ils étaient deux excommuniés qui ne peuvent plus prier dans aucune église et dont le dieu est un dieu secret, intime, dont ils ignorent jusqu’au nom. » page 341

Si je commence ce billet par ce long passage c’est qu’il résume très bien ce livre et que c’est le passage le plus fort de ce roman.

En 1944 Mathilde jeune alsacienne, un peu rebelle, avide d’inconnu, rencontre Amine soldat marocain  de l’armée française. Fous amoureux, après la guerre ils rentrent ensemble à Meknès et s’installent dans une petite ferme. Assez rapidement, deux enfants Aïcha et Selim viennent agrandir le cercle familial. Dans ce premier tome l’auteure nous raconte la vie de cette famille sur dix années. Dès le début j’ai été happée par les personnages de ce roman, bien sûr par Mathilde, mais pas que. Mathilde et Amine vivent côte à côte mais pas ensemble, quand l’un veut prouver à l’autre qu’il l’aime malgré les différences malgré les difficultés c’est l’incompréhension car chacun vit dans son monde sa culture ses coutumes. Difficile d’entrer dans « Le pays des autres ». L’écriture de Leïla Slimani est subtile et tout en finesse, sans jugement, elle ne s’acharne pas sur Amine qui frappe sa femme sa sœur elle ne le défend pas non plus elle raconte tout simplement, Amine un être fier, pris au piège écartelé entre deux cultures . Lorsque la situation dégénère vraiment entre les marocains et les colons, il épouse vite Mathilde pour la protéger, il marie Selma contre sa volonté pour aussi la protéger même si cela  est révoltant. Il veut leur éviter le pire et le pire lui il sait ce que cela signifie. Mouilala la mère d’Amine, Selma sa sœur, Aïcha sa fille, de beaux portraits de femmes qui au côté de Mathilde rendent ce livre passionnant, j’ai hâte de les retrouver dans le tome 2. Mathilde est tout simplement la grand-mère de Leïla Slimani  mais celle-ci  a su se mettre en retrait et garder la place de la narratrice . Un livre visuel où le lecteur voit les chemins, les paysages, les villes tant ils sont bien décrits.

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