La décision de Karine Tuil

Quand je referme un livre de Karine Tuil, je suis  bousculée dans mes convictions, je suis submergée par l’émotion, je suis perdue devant mon clavier, je suis admirative devant son écriture si sobre et devant son analyse si pointue, je suis-je suis  …..

Alma Revel est juge d’instruction à Paris dans la brigade anti- terroriste, elle a 49 ans, mariée, mère de trois enfants. Dans un laps de  temps assez court, elle va être confrontée à deux décisions  l’une d’ordre professionnel : décider de  libérer ou non un homme suspecté de terrorisme et l’autre d’ordre privé : quitter son mari.  Elle vient de rencontrer un avocat Emmanuel  et entretient avec lui une liaison dangereuse car il est l’avocat du mis en examen. Rapidement Karine Tuil dresse  le portrait d’Alma, son enfance, ses parents, ses enfants, son mari et surtout elle décortique les blessures d’Alma. Elle profite du personnage d’Emmanuel pour égratigner la haute bourgeoisie intellectuelle des années 70 et analyser les zones d’ombre de la vie d’Emmanuel qui n’est pas non plus celui qu’on croit. Karine Tuil excelle dans l’art de mélanger dans le même livre un document et un roman. Karine Tuil est très rigoureuse dans son travail,elle s'immerge complètement dans le monde qu'elle décrit,  son analyse est fine  et elle ne  juge jamais. Lorsqu’on referme le livre on a beaucoup appris sur le métier de juge d’instruction à la brigade anti -terroriste c’est net clair et précis surtout dans le chapitre 24 page 166 : «  J’exerce un métier difficile, un métier de conflit….etc... » elle est confrontée à la haine et à la violence  des assassins mais aussi celles des familles de victimes. C’est lourd très lourd ! C’est Alma elle-même qui raconte à la première personne et cela donne de la  proximité avec le lecteur et beaucoup d’empathie pour le personnage. La construction est originale et fluide, entre les chapitres qui racontent, s’intercalent les interrogatoires qu’elle mène face au terroriste Abdeljalil Kacem face à la mère Meriem Kacem face à l’épouse Sonia. Lorsque j’ai refermé ce roman dont bien sûr je ne révèlerai pas l’issue je me suis posée la question et moi Qu’aurais-je décidé ? J’ai pensé à la chanson de JJ Goldman « Si j’étais né en 17 à Leidenstadt  … »

La décision, la bonne, la mauvaise, non celle qui est juste voilà celle qu’Alma a prise.

Magnifique roman.

Je suis une fidèle lectrice de Karine Tuil!